FINANCIÈRES INTERNATIONALES (INSTITUTIONS)

FINANCIÈRES INTERNATIONALES (INSTITUTIONS)
FINANCIÈRES INTERNATIONALES (INSTITUTIONS)

Par institutions financières internationales, on entendra ici le Fonds monétaire international (F.M.I.), le groupe de la Banque mondiale et la Banque des règlements internationaux (B.R.I.). Ces trois institutions constituent ce qu’on peut appeler les institutions monétaires et financières internationales au sens complet du terme, ou à vocation mondiale. Elles ont pour fonction explicite d’intervenir sur un plan quasi mondial en matière de régulation monétaire ou financière. Il existe d’autres très nombreuses institutions financières internationales, par exemple celles qui sont à vocation «régionale», telles que la Banque européenne d’investissement, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, la Banque africaine de développement, la Banque interaméricaine de développement, la Banque asiatique de développement, la Banque islamique, etc. Leur objectif principal est de fournir des ressources financières à des institutions économiques diverses dans une zone géographique limitée, régionale ou continentale. Elles n’ont pas directement de fonction de régulation financière mondiale.

Les trois institutions financières internationales retenues ont pour objectifs principaux de fournir des ressources financières aux pays membres ou à des banques centrales et d’intervenir au niveau le plus élevé pour la régulation du système financier et monétaire mondial. En matière de financement, le F.M.I. est spécialisé dans les crédits destinés à permettre aux pays membres de retrouver l’équilibre de leurs paiements extérieurs; la Banque mondiale a pour objet de fournir des prêts à des pays en développement pour financer des projets d’investissement; la B.R.I. octroie des concours divers à des banques centrales. Un objectif commun de ces trois institutions est d’assurer davantage de coopération financière entre le plus grand nombre possible de pays dans le monde.

1. Le Fonds monétaire international

Objectifs et historique

Le Fonds monétaire international (F.M.I.) est une institution internationale qui a des fonctions de financement et de régulation dans les relations monétaires et financières entre pays membres. Les objectifs initiaux de la convention étaient de réaliser la stabilité des taux de change avec des parités fixes entre les monnaies des pays membres, d’éviter les contrôles des changes et autres restrictions financières, les pratiques discriminatoires et les taux de change multiples, et d’assurer la convertibilité des monnaies. La réalisation de ces objectifs devait contribuer à promouvoir croissance et plein-emploi avec un régime de paiement multilatéral libéralisé.

Après les difficultés monétaires internationales de la fin des années 1960 et du début des années 1970, les objectifs du F.M.I. ont été modifiés: les pays membres s’engagent à coopérer entre eux et avec le Fonds en vue de maintenir des régimes de change ordonnés et d’éviter les contrôles et restrictions monétaires et financiers nuisibles. Le Fonds définit et surveille l’application de ces engagements.

On se trouve devant deux régimes de régulation des relations monétaires nettement différents selon qu’on considère le régime qui a été appliqué dans la période 1946-1971 et celui de la période qui va de 1971 à nos jours. La première a été celle des accords de Bretton Woods, la seconde celle des accords de Kingston (Jamaïque).

Le régime de Bretton Woods

Avec la volonté d’éviter les difficultés des années qui avaient précédé la Seconde Guerre mondiale, quarante-cinq délégués des gouvernements alliés se sont accordés pour rédiger les statuts du F.M.I. en 1944 à Bretton Woods, aux États-Unis. Dès le 27 décembre 1945, les statuts ont été signés par vingt-neuf gouvernements, et le F.M.I. a pu commencer de fonctionner en 1946.

L’accord consistait, d’abord, dans l’engagement des pays membres d’établir une parité officielle fixe pour leur monnaie par rapport à l’or. C’était en réalité un régime d’étalon change-or. En effet, le dollar, principale monnaie de réserve utilisable à cette époque, était officiellement convertible en or à un prix fixe auprès des autorités monétaires américaines. Les monnaies étaient donc définies par rapport au dollar-or. Le second engagement consistait à maintenir la parité officielle à l’intérieur de marges de fluctuation de 1 p. 100 de part et d’autre de la parité. C’était accepter un régime de taux de change quasi fixes. Les pays membres pouvaient modifier leur parité, mais devaient en avertir le F.M.I. Une modification supérieure à 10 p. 100 nécessitait l’accord du Fonds. Le cours du change d’une monnaie devait être réglé par les interventions du pays concerné. Celui-ci, chargé de défendre sa monnaie, intervenait sur le marché en achetant ou en vendant selon le cas des monnaies de réserve, dollar principalement, et livre sterling accessoirement.

Pour permettre aux États membres de tenir ce double engagement en cas de déséquilibre extérieur et d’insuffisance de réserves, le F.M.I. pouvait fournir des ressources en devises aux pays membres. Le Fonds avait été organisé comme une sorte de coopérative des pays membres. Ceux-ci lui versaient des contributions en or et en monnaie nationale qui étaient fonction principalement de leur dimension économique: c’étaient leurs souscriptions au Fonds, ou quotes-parts ou quotas.

En troisième lieu, le F.M.I. était un forum conçu pour permettre aux pays membres de se consulter et de coopérer en matière de relations monétaires internationales.

Ce n’est que vers la fin des années 1950 et au début des années 1960 que les monnaies des principaux pays membres sont devenues convertibles et que ces pays ont pu respecter approximativement leurs engagements. Le fonctionnement de ce régime allait rencontrer divers problèmes. Le principal était de régler l’offre d’actifs de réserve (or, dollar, accessoirement livre sterling). L’offre d’or ne pouvait croître à volonté, et la fourniture du principal instrument de réserve dépendait des déficits extérieurs des États-Unis. Il y avait là une contradiction entre la volonté de disposer de dollars en quantité croissante et la confiance dans le dollar qui ne pouvait que décroître, compte tenu du stock d’or américain disponible et de la possibilité de demander la conversion en or des dollars. Une première tentative pour résoudre ce problème a été la conclusion du premier amendement aux statuts, avec la création d’un nouvel actif de réserve, les droits de tirage spéciaux créés par le Fonds (D.T.S.) en juin 1969. D’autres problèmes provenaient des évolutions économiques divergentes des pays membres. Le régime des changes fixes était soumis à de fortes tensions, et des dévaluations ou réévaluations souvent dramatiques intervinrent dans les années 1960. Enfin, le 15 août 1971, les États-Unis étaient contraints de dénoncer la convertibilité du dollar en or, à cause de la disproportion entre leur stock d’or et la masse des dollars détenue à l’extérieur. C’était l’effondrement du premier pilier sur lequel reposait l’accord de Bretton Woods.

Le régime de la Jamaïque

Les marges de fluctuation avaient été élargies à 梁 2,25 p. 100 à la fin de décembre 1971. Mais le manque de confiance dans le dollar et sa dévaluation conduisirent, dès mars 1973, à l’effondrement du régime de la fixité des taux de change, et à une généralisation du flottement des monnaies des principaux pays industriels. C’était la fin du régime de Bretton Woods et du F.M.I. «première manière». Les pays membres s’engagèrent dans une longue période de tâtonnements et d’études en vue de réformer l’accord, avec les services du F.M.I.

En janvier 1976, à Kingston (Jamaïque), les pays membres acceptèrent le second amendement aux statuts, qui entra en vigueur en 1978. Le nouveau régime, ou F.M.I. «deuxième manière», comportait trois caractéristiques principales.

En matière de régime de change, chaque membre adopte les dispositions de son choix pour le flottement de sa monnaie. En 1986, trente-deux pays avaient établi le taux de change de leur monnaie par référence au dollar; quatorze pays par référence au franc français; cinq pays par référence à une autre monnaie; quarante-trois pays l’avaient établi par référence à un «panier» de monnaies, dont onze par référence au «panier» D.T.S. Cinq pays avaient un taux de change défini par référence à un ensemble d’indicateurs économiques; huit pays de la C.E.E. avaient un régime de taux flexibles entre eux et flottants par rapport au dollar; quarante pays avaient des régimes de flottement «dirigés» ou «indépendants», et cinq pays avaient choisi une «flexibilité limitée» par rapport au dollar. Le F.M.I. était ensuite chargé de surveiller les politiques des taux de change des pays membres afin d’éviter les désordres dommageables. Enfin, le prix officiel de l’or était aboli et l’or était exclu comme moyen de paiement officiel entre pays membres et à l’intérieur du F.M.I. En contrepartie, le rôle des D.T.S. était élargi et il était souhaité d’en faire l’actif de réserve principal du nouveau système monétaire.

En considérant le cours des événements en matière de changes entre 1976 et 1987, il est constatable que les pays membres ont renoncé à une régulation monétaire internationale digne de ce nom avec le second amendement. La «surveillance» des politiques de change par le F.M.I. ne peut pas remplacer un régime de taux de change fixes, même ajustables. Seul un tel régime de fixité est capable de réduire l’incertitude et les désordres en dirigeant le cours des événements et en fournissant des normes de référence dans ce domaine. Tout le reste, et notamment le flottement des monnaies, équivaut à s’incliner devant la «loi» des événements, même quand on la travestit en «loi du marché».

Organisation du F.M.I.

En 1992, le F.M.I. comprend cent cinquante-cinq pays membres. Tous les pays industriels, sauf la Suisse, en sont membres. La Hongrie, la Roumanie, la Pologne sont également membres de l’accord, ainsi que la Chine populaire.

Administration

Le F.M.I., institution intergouvernementale, est administré par le Conseil des gouverneurs, le conseil d’administration, le directeur général et les services du Fonds. Chaque pays est représenté au Conseil des gouverneurs par un gouverneur et un gouverneur suppléant. Le nombre de voix dont dispose un pays reflète principalement sa souscription au Fonds (ou quota). Celle-ci est fonction de l’importance relative du pays dans l’économie mondiale. En 1986, les États-Unis disposaient de 19,29 p. 100 du total des droits de vote (c’est-à-dire d’un droit de veto); les douze pays de la C.E.E. réunissaient 25,1 p. 100 des droits de vote; les États-Unis, les Douze, le Japon, le Canada et les pays scandinaves totalisaient 54,1 p. 100 des droits de vote. Pour les décisions les plus importantes, une majorité de 85 p. 100 est nécessaire.

Le Conseil des gouverneurs est l’organe principal du Fonds (détermination des quotas, admission de nouveaux membres, création de D.T.S...). Il se réunit au moins une fois par an. Les affaires courantes du F.M.I. sont conduites par le conseil d’administration composé, en 1986, de vingt-deux membres, présidé par le directeur général. Cinq administrateurs sont nommés par les États-Unis, le Royaume-Uni, la R.F.A., la France et le Japon, pays dont les quotas sont les plus importants. Un administrateur est nommé par l’Arabie Saoudite, actuellement principal pays créancier du F.M.I. Seize administrateurs sont élus pour deux ans par les autres membres ou groupes géographiques de pays membres, dont un pour la Chine.

Le conseil d’administration nomme pour cinq années, mandat renouvelable, le directeur général qui est président du conseil d’administration et chef des services du F.M.I. (environ 1 700 fonctionnaires en 1986). À côté de ces organes, il existe encore un comité intérimaire sur le système monétaire international, composé de vingt-deux membres, chargé d’examiner les situations économique et monétaire internationales ainsi que le rôle du Fonds, et un comité ministériel du développement, qui s’intéresse aux questions de développement et d’aide, et qui est un comité mixte des Conseils des gouverneurs de la Banque mondiale et du F.M.I.

Le financement du F.M.I.

Le financement du F.M.I. repose sur deux moyens: les souscriptions et les emprunts.

Chaque pays membre fournit une souscription équivalant à son quota. Les quotas sont déterminés par le Fonds selon des méthodes qui ont varié dans le temps. Ils sont réexaminés à des intervalles ne dépassant pas cinq ans. La souscription est actuellement versée à raison de 25 p. 100 en D.T.S. ou en monnaies convertibles désignées par le Fonds, et pour le reste en monnaie nationale. Le total des souscriptions depuis la huitième révision, réalisée en 1983, atteint près de 90 milliards de D.T.S. (environ 108 milliards de dollars au cours de janvier 1987).

Les souscriptions constituent la ressource la plus importante du Fonds. Mais le F.M.I. peut compléter ses moyens de financement par des emprunts. Le F.M.I. emprunte auprès de pays membres, mais il pourrait également emprunter auprès de sources commerciales. Il ne l’a pas encore fait. En vertu des accords généraux d’emprunt (A.G.E., ou G.A.B. en anglais) qui existent depuis 1962 et qui sont renouvelables, le F.M.I. dispose en 1986 de 18,5 milliards de D.T.S. sous forme de lignes de crédits mises à sa disposition par le groupe des Dix (dix pays industrialisés), la Suisse et, depuis 1984, l’Arabie Saoudite. Le F.M.I. a encore obtenu des prêts bilatéraux auprès de quatorze pays membres, de la Banque nationale suisse et de l’Agence monétaire de l’Arabie Saoudite. En 1986, l’encours des emprunts du F.M.I. figurait pour 14,5 milliards de D.T.S. à son bilan.

On peut en conclure que le F.M.I. ne fonctionne pas seulement comme une coopérative de crédit à capital variable, basée sur les souscriptions des pays membres. Il est aussi fortement tributaire des emprunts contractés auprès de certains pays afin de pouvoir répondre aux besoins croissants des autres.

Principales fonctions du F.M.I.

On peut distinguer les fonctions de financement du F.M.I. et ses fonctions de régulation dans le système monétaire international (S.M.I.).

Utilisation des ressources du F.M.I. et conditionalité des crédits

Pour faire face à des difficultés de financement de leur balance de paiements, les pays membres peuvent obtenir des ressources du Fonds dans le cadre de «mécanismes» de crédit permanents ou qui ont existé temporairement (par exemple la «facilité pétrolière» en 1974-1975).

Quand un pays souhaite obtenir des crédits du Fonds, celui-ci lui demande d’adopter des mesures économiques destinées à corriger le déficit de ses paiements extérieurs et à donner au F.M.I. l’assurance que le demandeur pourra rembourser les ressources prêtées. Cet aspect des mesures de financement du F.M.I. est désigné sous le nom de «conditionalité». Celle-ci fait référence à des conditions que doit remplir le demandeur pour obtenir des prêts. Plus les déficits sont importants, plus ils paraissent graves et chroniques, plus les conditions définies par le F.M.I. sont contraignantes. Elles consistent toujours en des mesures de politique économique destinées à permettre au pays demandeur de retrouver son crédit extérieur et de réduire ses déficits intérieur et extérieur. Ce sont en général ce qu’on appelle des mesures d’austérité qui sont ainsi préconisées. On a beaucoup glosé sur le caractère «antisocial» des mesures «d’ajustement» imposées par le F.M.I. aux débiteurs. Les appréciations portées sur ces politiques ne peuvent être que nuancées. Il est malheureusement vérifiable que les pays ont souvent attendu le dernier moment pour recourir au Fonds. Du temps où c’était possible, surtout dans les années 1970, ils ont préféré recourir aux banques commerciales pour financer leurs déficits, appréhendant justement d’avoir à remettre en ordre leurs économies en liaison avec une instance, le Fonds, qui le leur recommanderait... Lorsqu’ils ont été contraints de recourir au Fonds, la situation était souvent dramatique: le financement des déficits n’était plus accepté par d’autres institutions de financement... Par ailleurs, il est bien évident qu’il importe de disposer de garanties appropriées pour préserver le caractère renouvelable des ressources du Fonds et sa capacité de financement.

Les services du F.M.I. aident les pays demandeurs à définir des programmes d’«ajustement» adaptés à leur cas particulier et qui, de plus en plus, tiennent compte de leurs objectifs économiques et sociaux et de leurs priorités.

Le degré de conditionalité dépend de la gravité des problèmes de balance du demandeur et de leur caractère passager ou chronique, et donc de l’importance des ressources de financement demandées pour y faire face, mesurées par rapport à la quote-part du demandeur. Il y a, ainsi, des ressources assorties d’une conditionalité nulle (première tranche de crédit égale à 25 p. 100 de la quote-part), des ressources assorties d’une conditionalité faible mais croissante, et des ressources assorties de conditions d’obtention plus sévères, par exemple pour le «mécanisme élargi de crédit» ou la «politique d’accès élargi».

Le pays demandeur doit présenter à l’appui de sa demande une «lettre d’intention» précisant sa demande (simple accord de confirmation ou accord élargi de crédit), et présentant son programme de rééquilibre économique. Les programmes présentés au F.M.I. impliquent des objectifs quantifiés et des calendriers de réalisation. Les ressources sont fournies au fur et à mesure de la réalisation des engagements pris par le demandeur.

La conditionalité a évolué avec la pratique et l’expansion de l’assistance du F.M.I., notamment depuis la fin des années 1970. En 1979, le F.M.I. a précisé une série de douze directives ou normes en matière de conditionalité qui permettent au Fonds et aux pays membres de connaître plus précisément leurs droits et obligations et d’éviter certaines difficultés ou des litiges.

Les modalités d’accès aux ressources du F.M.I. au titre de l’un des divers «mécanismes» de crédit sont les suivantes: un pays membre achète au Fonds (on dit qu’il effectue un «tirage»), à l’aide de sa monnaie, un montant équivalent de monnaies d’autres membres ou de D.T.S. Ces ressources sont utilisées pour financer le déficit de ses comptes extérieurs ou pour constituer des réserves. Le tireur verse au F.M.I. une commission. Après un délai spécifié dans chaque cas, le tireur doit rembourser le F.M.I. Il le fait en lui rachetant le montant de sa monnaie versée lors du tirage à l’aide de D.T.S. ou de devises spécifiées par le Fonds.

On peut distinguer en 1987 sept «mécanismes de crédit» ou d’utilisations des ressources du Fonds.

Tranche de réserve . Un pays membre dispose d’une tranche de réserve au F.M.I. dans la mesure où les avoirs du Fonds en sa monnaie au «compte des ressources générales» sont inférieurs à la quote-part du pays – à l’exclusion des avoirs provenant de l’utilisation par le pays des mécanismes de crédits du Fonds. La somme de la tranche de réserve et des prêts qu’un pays a accordés au Fonds constitue le montant des réserves que ce pays détient sous forme de créances sur le F.M.I. Un pays peut à tout moment utiliser sa tranche de réserve, et cela ne constitue pas à proprement parler un recours au crédit du F.M.I.

Tranche de crédit . Le mécanisme de crédit normal du F.M.I. est constitué par la série des quatre tranches de crédit qui sont chacune égale à 25 p. 100 de la quote-part. Les trois dernières tranches sont appelées tranches supérieures de crédit. Le conseil d’administration examine toutes les demandes de tirage. Pour la première tranche, le pays membre doit présenter un programme pour surmonter les difficultés de balance des paiements, mais les ressources sont accordées sans critère de réalisation ni échelonnement des achats. Pour les tranches «supérieures», le demandeur doit donner des «preuves solides» de ses efforts pour surmonter ses difficultés de paiements. Les ressources sont normalement disponibles sous formes d’accords de confirmation, permettant des tirages effectués sur une période d’un an, qui peut être portée jusqu’à trois ans. Ces accords sont assortis de critères de réalisation des engagements pris et les tirages sont échelonnés.

Mécanisme élargi de crédit . Si le pays rencontre des déficits de paiements dits «structurels», l’«ajustement» demandera plus de temps et des ressources plus importantes que ne le permet le mécanisme de crédit «normal». Dans ce cas, le pays peut utiliser le mécanisme élargi avec lequel il peut tirer, au-delà de la première tranche de crédit, un montant maximal égal à 140 p. 100 de son quota. Le pays doit présenter un programme à moyen terme destiné à corriger les déficiences structurelles de sa balance. Des critères de réalisation sont appliqués et les tirages sont échelonnés. Les tirages sont normalement remboursables dans un délai de trois à cinq ans dans le cas du mécanisme normal et de quatre à dix ans dans celui du mécanisme élargi.

Politique d’accès élargi . Cette politique, qui a succédé au mécanisme dit de financement supplémentaire, a pour objet de fournir un financement supplémentaire, en plus des ressources normales, aux pays membres aux prises avec des déséquilibres de paiement graves par rapport à leur quota. Le financement accordé dans ce cas est constitué par des ressources empruntées par le F.M.I. associées à des ressources ordinaires provenant des souscriptions. Les conditions sont évidemment plus sévères et les commissions sont basées aussi sur le coût des emprunts pour le F.M.I. Les rachats sont faits dans un délai de trois à sept ans. Conformément aux directives en vigueur en 1986, les limites d’utilisation par un pays de la «politique d’accès élargi» sont de 90 à 110 p. 100 du quota par an, de 270 ou 330 p. 100 du quota sur trois ans, l’utilisation nette totale des ressources du Fonds étant limitée à 400 ou à 440 p. 100 de la quote-part. Cette limite s’applique aux tirages effectués au titre des tranches normales, du mécanisme élargi et de la politique d’accès élargi.

Mécanisme de financement compensatoire . Il peut être utilisé par un pays membre dans le cas d’une baisse temporaire des recettes d’exportation (surtout de produits primaires) due à des facteurs indépendants de la volonté du pays, ou dans celui d’une hausse temporaire du coût de ses importations de céréales. Le demandeur est tenu de coopérer avec le Fonds afin de résoudre ses difficultés de balance. L’encours des tirages est limité à 83 p. 100 du quota.

Mécanisme de financement de stocks régulateurs . C’est un crédit destiné à aider les pays membres à verser leurs cotisations à des stocks régulateurs internationaux de produits primaires agréés. Le demandeur doit coopérer avec le F.M.I. comme dans le cas du financement compensatoire pour surmonter ses difficultés de balance des paiements. Les tirages sont plafonnés à 45 p. 100 du quota.

Facilité d’ajustement structurel (F.A.S.). Dernier-né (1986) des mécanismes de crédit, la F.A.S. est destinée à fournir aux pays en développement à «faible revenu», aux prises avec des difficultés de balance des paiements, une aide à des conditions particulièrement favorables. Le demandeur doit accepter d’appliquer des programmes d’ajustement structurel à moyen terme. Le montant d’un prêt F.A.S. peut représenter au départ 47 p. 100 du quota du demandeur. Ces prêts sont assortis d’un taux d’intérêt de 0,5 p. 100 et d’une période de grâce de cinq ans, les remboursements se faisant sur les cinq années suivantes. Financements compensatoires et financements de stocks régulateurs ont été peu utilisés.

Les droits de tirage spéciaux (D.T.S.)

Les D.T.S. constituent une monnaie de réserve internationale que le F.M.I. a créée pour compléter les actifs de réserve existants. Les D.T.S. sont également utilisés par le F.M.I. et par d’autres institutions comme unité de compte.

Les D.T.S. sont alloués aux pays membres qui tous participent au «département des D.T.S.» au prorata de leur quota, pendant des périodes déterminées au sein des organes du F.M.I. Un total de 9,3 milliards de D.T.S. a été distribué au cours de la période 1970-1972. Pendant une deuxième période, allant de 1979 à 1981, des allocations de 4 milliards de D.T.S. chacune ont encore été effectuées. Il existe à présent un total de 21,4 milliards de D.T.S., soit environ 6 p. 100 du total des réserves internationales sous forme de devises. Les pays membres ont cependant exprimé leur intention dans le deuxième amendement des statuts du F.M.I. de faire en sorte que les D.T.S. deviennent le principal instrument de réserve du système monétaire international. Cependant, il semble qu’ils ne souhaitent pas encore renoncer à l’une des principales marques de leur souveraineté, du moins pour ceux qui disposent d’une monnaie forte ou d’une monnaie de réserve internationale.

L’allocation de D.T.S. aux pays membres ou leur utilisation ne sont pas soumises à la «conditionalité». Les D.T.S. peuvent être utilisés dans de nombreuses transactions entre les pays membres détenteurs. Il existe également seize détenteurs agréés par le F.M.I. en dehors des États membres (certaines institutions internationales).

En principe, toute unité monétaire peut être échangée contre des D.T.S. au taux de change officiel vis-à-vis de ce dernier. C’est le F.M.I. qui définit la méthode de calcul des D.T.S. De 1974 à 1980, la valeur des D.T.S. était calculée en fonction des taux de change sur le marché d’un «panier» composé des monnaies des seize pays membres dont les exportations étaient les plus importantes. Depuis 1981, le panier est composé des monnaies des cinq pays membres dont la part dans les exportations mondiales est la plus importante. Les coefficients de pondération retenus à la fin de 1985 étaient de 42 p. 100 pour le dollar, de 19 p. 100 pour le deutsche Mark, de 15 p. 100 pour le yen et de 12 p. 100 pour le franc français et la livre sterling. Les monnaies qui déterminent la valeur des D.T.S. et la pondération sont en principe révisées toutes les cinq années. On trouvera, dans le tableau, un exemple de calcul de la valeur des D.T.S. (30 juin 1986).

Chaque jour, le F.M.I. publie les taux de change d’un nombre important de monnaies exprimés en D.T.S. Les D.T.S. sont aussi l’unité de compte employée par le F.M.I. Ils ont également cette fonction dans de nombreuses organisations internationales ainsi que pour des dépôts auprès de quelques banques commerciales. Onze pays définissent en 1986 leur monnaie par référence au D.T.S. La principale critique faite à ce panier destiné à servir d’étalon international de la valeur des monnaies est que les D.T.S. ne peuvent être en même temps un étalon de mesure pour d’autres monnaies et être définis par l’intermédiaire de ces monnaies.

Les fonctions de régulation du F.M.I.

On peut distinguer les fonctions de consultation et de surveillance, les fonctions de gestion des surendettements et celles d’assistance technique et d’information.

Les fonctions de consultation et de surveillance . Les statuts du F.M.I. le chargent de veiller sur le bon fonctionnement du système monétaire international (S.M.I.) et de surveiller notamment les politiques de change des pays membres. L’objectif principal de l’accord est de promouvoir un système multilatéral de paiements en cherchant à éviter ou à supprimer les contrôles ou restrictions de change, ainsi que les pratiques et les taux de change multiples. En 1986, une soixantaine de pays membres satisfont à l’article 8 des statuts qui proscrivent les restrictions de change. Les autres pays, en vertu de l’article 14, peuvent utiliser «temporairement» certains contrôles et restrictions sur leurs paiements et transferts, mais s’engagent à les lever dès que la situation de leurs paiements le permet. Le F.M.I. suit évidemment ces pratiques, en rend compte dans ses publications et cherche à les faire supprimer.

Depuis 1977, le Fonds a formulé trois principes relatifs à la «surveillance» sur les politiques de change:

– les pays membres s’abstiennent de manipuler les taux de change en vue d’empêcher l’ajustement de la balance des paiements ou de s’assurer un avantage compétitif inéquitable sur d’autres pays membres;

– les membres doivent intervenir sur le marché des changes pour contrecarrer un désordre pouvant être caractérisé, notamment, par des fluctuations à court terme perturbatrices de la valeur de change de sa monnaie;

– les pays membres prennent en considération, dans leurs politiques d’intervention, les intérêts des autres membres.

Il a même été défini une «surveillance accentuée» du F.M.I. qui lui permet, à la demande d’un pays membre, d’aider dans certains cas déterminés les pays débiteurs à normaliser leurs relations financières avec leurs créanciers.

Pour qu’il puisse accomplir ses fonctions de surveillance, le Fonds doit disposer d’informations à jour. Dans ce but, il tient avec chacun des pays membres des «consultations». Celles-ci sont normalement annuelles et ont pour objet d’étudier la situation économique et financière du pays membre ainsi que les politiques qu’il applique. Les consultations consistent généralement dans des entretiens qui ont lieu dans les pays membres entre leurs représentants et des fonctionnaires du F.M.I. Les services du Fonds présentent ensuite un rapport qui est examiné par le conseil d’administration. Les commentaires des administrateurs sont résumés par le directeur général et transmis aux gouvernements des pays membres.

Dans la période récente, le F.M.I. organise aussi des consultations spéciales avec les pays membres dont les politiques sont les plus importantes pour l’économie mondiale. Elles sont menées dans le cadre de l’examen annuel des perspectives de l’économie mondiale par le conseil d’administration. On rencontre ici une préoccupation récente du F.M.I., qui consiste à pousser les grands pays industriels (groupe des Cinq, groupe des Sept) à rendre plus compatibles leurs politiques économiques et à s’entendre pour promouvoir une certaine stabilité des taux de change des principales monnaies.

En matière de «surveillance», une certaine asymétrie de fait existe: le Fonds peut moins exercer d’influence sur les pays qui n’ont pas besoin de recourir à ses ressources. En ce sens, l’influence du Fonds sur les pays en voie de développement (P.V.D.) faibles ou surendettés s’est renforcée depuis la fin des années 1970. L’emprise sur les politiques des grands pays industriels est faible. On voit mal comment le F.M.I. pourrait aider les États-Unis à réduire leur déficit extérieur par un accord de crédits assorti de recommandations de politique budgétaire... Mais il ne faut cependant pas oublier qu’il y a eu des cas où le F.M.I. a contribué à la remise en ordre de l’économie de certains grands pays industriels, comme la Grande-Bretagne et l’Italie à la fin des années 1960.

La fonction de «gestion» des surendettements . La dimension colossale de l’endettement des P.V.D., ses conséquences dramatiques pour leurs populations et dangereuses pour les institutions créancières et le réseau des relations interbancaires mondiales, c’est-à-dire le S.M.I., sont connues. Depuis la fin des années 1970, et surtout depuis l’annonce en 1982 de la cessation des paiements du Mexique, une part importante des activités du F.M.I. a été consacrée à des opérations de sauvetage des débiteurs, et donc des créanciers. Pour permettre aux débiteurs d’assurer le service de leurs dettes, le F.M.I. agit cas par cas et procède en relation étroite avec les pays débiteurs, les créanciers (autorités publiques et banques commerciales) et avec d’autres institutions financières internationales (Banque mondiale et B.R.I., notamment). En 1985, la proposition Baker a essayé de définir une méthode générale pour la gestion de la dette des pays particulièrement endettés. Elle repose sur trois principes. En premier lieu, les pays débiteurs doivent mettre en œuvre des politiques appropriées pour favoriser leur croissance, réduire l’inflation et réaliser l’«ajustement» extérieur, ce qui est conforme à la pratique du F.M.I. Deuxièmement, le F.M.I. doit continuer de jouer un rôle central dans la gestion de l’endettement. Troisièmement, les banques commerciales créancières doivent fournir de nouveaux financements nets aux pays débiteurs. Cette proposition a été bien accueillie, mais peu suivie d’effets: les banques commerciales répugnent à accorder de nouveaux crédits depuis 1982 et ne l’ont fait dans quelques cas que pour éviter des catastrophes. En revanche, le F.M.I. a considérablement accru ses financements depuis 1982 et a presque toujours tenu un rôle de chef de file dans les opérations de rééchelonnements des dettes. Il a aidé, d’une part, les P.V.D. à mettre au point des programmes économiques adaptés à leurs situations spécifiques. D’autre part, il a pesé de tout son poids afin que les autres créanciers continuent de fournir les ressources nécessaires pour éviter les cessations de paiements. En ce sens, il a joué un rôle de «catalyseur»: les banques et les États créanciers acceptaient les rééchelonnements, des réductions de taux et des financements supplémentaires nouveaux, à condition que le débiteur se soit entendu avec le F.M.I. et ait obtenu des concours de sa part. Mais les sommes en jeu sont tellement élevées que la question des surendettements est loin d’être réglée et laisse peser une grave menace de déstabilisation sur le S.M.I. La question est d’autant plus préoccupante en 1987 qu’on se rend compte que plusieurs pays industriels, les États-Unis notamment, vont eux aussi rencontrer de grandes difficultés pour assurer le service de leurs dettes extérieures d’ici à la fin des années 1980 ou au début des années 1990. Depuis 1987, il semble aussi que les banques commencent à adapter leurs comportements à l’hypothèse selon laquelle une grande partie des dettes ne pourra jamais être remboursée.

Les fonctions d’assistance technique et d’information . Le F.M.I. fournit de l’assistance technique aux pays membres à travers des consultations, des missions spéciales, ses représentants résidents et par l’intermédiaire des formations dispensées par l’institut du F.M.I. Il publie de nombreuses études qui font de lui l’un des principaux centres mondiaux pour la collecte et l’échange d’informations sur la situation monétaire et financière. On peut citer les Rapports annuels , Statistiques financières internationales , World Economic Outlook , Staff Papers , Balance of Payements Statistics , Direction of Trade Statistics , Annual Report on Exchange Arrangements and Exchange Restrictions , Bulletin du F.M.I.

Perspectives d’évolution du F.M.I.

Il y a, d’un côté, de nombreuses marques de désorganisation dans les relations monétaires internationales, ce qu’on peut appeler le système constitué par le F.M.I., les autorités monétaires des pays membres et les autres institutions financières. D’un autre côté, une certaine régulation continue de s’exercer, qui empêche de parler de «non-système». Faut-il réformer le F.M.I.?

Les facteurs de dérégulation dans le S.M.I.

Les politiques d’«ajustement» dans les pays surendettés et dans une «économie mondiale à découvert» (H. Bourguinat) se heurtent à des limites internes et externes. Les plans d’austérité rencontrent de plus en plus de résistances de la part des gouvernements et des populations qui y sont soumis. Les pays surendettés ont, pour la plupart, atteint les limites de ce qu’ils jugent acceptable et ne sont plus prêts à sacrifier leur développement au profit des banques créancières. Il est généralement reconnu qu’il est économiquement inadéquat que les flux de capitaux des P.V.D. vers les pays développés créanciers soient supérieurs aux flux inverses, comme c’est le cas après 1983.

L’inflation constitue, par ailleurs, le talon d’Achille du «sauvetage» des P.V.D. On peut être assuré que, avec les taux d’inflation chronique très élevés que connaissent les grands débiteurs, le transfert de ressources réelles vers les créanciers qu’implique tout service de la dette deviendra tout aussi impossible que pour l’Allemagne lors des «réparations» d’après 1919. Ajoutons à ce fait que les pays créanciers rendent eux-mêmes les «transferts» plus difficiles en renforçant leur protectionnisme à l’encontre des pays en développement. Enfin, les banques commerciales suivent avec des réticences croissantes les vœux du F.M.I.: leurs nouveaux crédits aux pays surendettés sont accordés plus que parcimonieusement.

D’un autre côté, les excédents courants de certains pays européens, du Japon et de quelques nouveaux pays industriels (contreparties de l’immense déficit commercial américain) permettent actuellement de financer les déficits extérieurs et intérieurs des États-Unis, et donc la croissance et l’emploi aux États-Unis. Est-ce longtemps tenable, d’autant plus que ce financement, avec la dépréciation du dollar, implique des pertes de change importantes pour les prêteurs et une diminution de la confiance dans la principale monnaie mondiale? Tout cela se produit dans une période de variations de grande amplitude et imprévisibles des taux de change des principales monnaies depuis 1971. La «surveillance» dont était chargé le F.M.I. par l’accord de la Jamaïque n’a pas permis de remédier à cette instabilité.

Enfin, le réseau interbancaire international lui-même est devenu plus fragile. De nombreux faits montrent que les banques commerciales ne sont pas devenues plus solidaires entre elles du fait des difficultés de leurs débiteurs. De leur côté, les banques centrales, les «autorités monétaires» nationales et le F.M.I. se rendent compte qu’il est de moins en moins possible pour eux d’être en prise sur ce que H. Bourguinat a nommé «le complexe monétaire et financier international». Il n’y a pas seulement «financiarisation» croissante des taux de change (c’est-à-dire dépendance croissante de ceux-ci à l’égard des facteurs financiers), mais encore de toute l’économie mondiale.

Système ou non système?

Depuis 1985, les principaux pays industriels ont cherché des moyens pour mieux coordonner leurs politiques économiques et pour parvenir à des taux de change jugés plus acceptables et plus stables pour leurs monnaies, conformément aux propositions du F.M.I. Mais on reste loin, même après les «accords du Louvre» de février 1987, de l’adoption de «zones d’objectifs» ou de «plages de référence» pour les taux de change. L’engagement de stabiliser les taux de change «autour de leurs cours actuels» pourra difficilement être tenu. Les autorités monétaires sont devenues quasi impuissantes à résister aux mouvements massifs des capitaux flottants.

Un deuxième processus allant dans le sens d’un renouveau de régulation est constitué par le mouvement de recentralisation que l’on constate dans le S.M.I. depuis les grandes angoisses de l’été de 1982. Dans les années 1970, les banques commerciales avaient largement été maîtresses du jeu monétaire et financier. Le S.M.I. s’était décentralisé à l’extrême. Après le coup de tonnerre mexicain de l’été de 1982, les banques commerciales et les pays créanciers ont été trop heureux de retrouver une institution de remise en ordre du S.M.I., autour de laquelle ils ont accepté de serrer les rangs... Il y a eu recentralisation du S.M.I. autour du F.M.I. et grâce à l’action du F.M.I. Celui-ci a su éviter la dislocation du réseau des relations monétaires et, d’abord, de graves difficultés aux créanciers.

Dire qu’il y a «non système» monétaire international (de flexibilité incontrôlée des taux de change) constitue certainement une outrance de langage. Malgré ses défaillances, le S.M.I. à taux de changes flottants plus ou moins incontrôlés (plutôt moins) a permis un développement rapide du commerce mondial dans les années 1970. Il n’a pas été possible d’établir qu’il est le seul facteur négatif dans le ralentissement commercial international des années 1980. Il n’y a pas non plus «non système» pour la raison qu’on constate effectivement diverses régulations en cours: les gouvernements et les institutions monétaires internationales continuent d’agir et parviennent à conserver un minimum d’ordre dans les mouvements des taux de change et dans les difficiles tractations entre créanciers et débiteurs de l’immense dette extérieure existante. Le S.M.I. fonctionne mal; il est insuffisamment et mal régulé, certes; mais il n’est pas cassé et le F.M.I. continue d’exister; donc, avec lui, un accord international dans les relations monétaires qui ne s’est pas encore révélé tout à fait vide de sens... La grande faiblesse du F.M.I. en matière de régulation est due au manque de courage des pays membres en 1976: lorsqu’ils ont accepté de renoncer à la seule méthode de régulation digne de ce nom, le régime des taux de change fixes.

Réforme du F.M.I.?

Le thème est inépuisable puisqu’il implique celui de la réforme du S.M.I., c’est-à-dire, finalement, celui de l’acceptation par les États d’un degré plus élevé de coordination de leurs politiques économiques...

En ce qui concerne le F.M.I., ses fonctions régulatrices de «surveillance multilatérale» devront être redéfinies à partir de la notion d’«indicateurs économiques objectifs» qui se fait jour dans les récentes conférences intergouvernementales des grands pays industriels. Ces indicateurs auraient pour objet de mieux guider les gouvernements dans la définition de leurs politiques économiques et leurs tentatives de coordination de ces dernières. Il est possible que la coordination des politiques des grands pays industriels suppose la mise en commun des compétences du F.M.I. et de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Les fonctions de financement du F.M.I. devront être appuyées de moyens plus importants, de même que celles de la gestion de la dette internationale. Une coordination croissante entre F.M.I., Banque mondiale et B.R.I. existe. Il sera probablement utile de la renforcer. Mais la dette internationale ne pouvant probablement pas être remboursée, il faudra donner au F.M.I., ou à une autre institution, les moyens de collectiviser dans l’ordre et au niveau mondial les pertes... Le maintien d’un ordre minimal dans le S.M.I. implique un accord intergouvernemental. Celui-ci pourra continuer de s’appeler F.M.I., ou prendre une autre appellation...

2. Le groupe de la Banque mondiale

Objectifs et historique

Lors de la conférence de Bretton Woods de 1944, une deuxième institution intergouvernementale a été créée, après le F.M.I.: la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (B.I.R.D.), appelée ensuite plus couramment la Banque mondiale. La B.I.R.D. avait deux objectifs principaux: aider à la reconstruction des pays dévastés par la guerre; participer au développement économique des États membres en contribuant au financement de projets d’investissement. Les prêts que la B.I.R.D. pourrait consentir devaient être destinés à des projets d’investissements indirectement ou directement productifs.

La B.I.R.D. a commencé de fonctionner en juin 1946 avec une quarantaine de pays membres. Les premières opérations en 1947 furent des prêts à des pays de l’Europe occidentale. Comme les prêts de la B.I.R.D. ne pouvaient pas suffire à répondre aux besoins immenses de la reconstruction, l’aide Marshall fournie par les États-Unis vint les relayer dès 1948.

Après 1948, la B.I.R.D. s’est presque entièrement consacrée aux prêts en faveur du développement économique. Ses statuts subordonnent l’octroi des prêts à la réalisation de projets bien étudiés, jugés prioritaires, visant à accroître la production de biens et de services dans le pays bénéficiaire, suivis et contrôlés par la B.I.R.D. On peut dire que, dans la période récente, l’objectif quasi exclusif de la Banque mondiale est de promouvoir le développement économique des P.V.D. membres par l’apport d’une aide financière et technique destinée à des projets d’investissement spécifiques et bénéficiant de la garantie de l’État membre concerné.

Organisation et financement de la B.I.R.D.

Organisation

Pour faire partie de la B.I.R.D., un État doit auparavant avoir été admis comme membre du F.M.I. et donc accepter les règles de conduite fixées par ce dernier en matière monétaire et d’accès aux informations. À la fin de 1992, la B.I.R.D. comptait cent cinquante-cinq pays membres, dont la Pologne, la Hongrie, la Roumanie, la Chine populaire, le Vietnam et la Yougoslavie. Lors de son adhésion, le pays membre souscrit une fraction du capital de la B.I.R.D., qui fonctionne donc, d’abord, comme une sorte de coopérative de crédit à capital variable et dont les membres sont des États. Cette souscription, qui dérive du quota affecté au pays par le F.M.I., est fonction de l’importance du pays dans l’économie mondiale. Le nombre de droits de vote ou voix est quasi proportionnel à cette souscription (250 voix pour chaque pays, plus une voix pour chaque part de capital souscrite: cela fait qu’il y a un léger avantage en faveur des petits pays). En 1986, les États-Unis avaient souscrit 20,98 p. 100 du capital et disposaient de 19,88 p. 100 des voix. La Gambie, avec 0,01 p. 100 des parts, disposait de 0,04 p. 100 des voix... Les douze pays de la C.E.E. disposaient de 29,94 p. 100 des voix. Avec le Canada et le Japon, les États-Unis et les Douze disposaient de 58,89 p. 100 des voix.

Chaque pays membre nomme un gouverneur et un gouverneur suppléant. L’ensemble des gouverneurs forme le Conseil des gouverneurs. Celui-ci est réuni en assemblée annuelle à l’époque de l’assemblée des gouverneurs du F.M.I. Les pouvoirs de la Banque sont dévolus au Conseil des gouverneurs qui peut en déléguer une partie aux administrateurs. Ce qui relève exclusivement des gouverneurs concerne l’admission de nouveaux membres, l’augmentation du capital, l’interprétation des statuts, la conclusion d’accords avec d’autres institutions internationales, la répartition du revenu net annuel de la Banque.

Les administrateurs constituent le principal organe de direction de la Banque et restent les représentants permanents des pays membres. Cinq sont nommés par les principaux souscripteurs (États-Unis, Japon, R.F.A., France et Royaume-Uni). Seize sont élus pour deux ans par un groupe géographique de pays. Chaque administrateur dispose en bloc du total des voix qu’il réunit.

Les administrateurs nomment le président de la Banque, qui dirige les services et le conseil d’administration. En 1986, les services de la B.I.R.D. comprenaient 6 002 fonctionnaires. Le président de la B.I.R.D. est aussi celui de ses deux filiales: Association internationale pour le développement (A.I.D.) et Société financière internationale (S.F.I.).

En octobre 1966 a été créé le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (C.I.R.D.I.). Il fonctionne avec le soutien logistique de la Banque et a pour objet de proposer des solutions de conciliation en cas de litiges à propos d’investissements internationaux. Environ quatre-vingt-dix pays sont signataires de cet accord.

En 1985, les gouverneurs de la Banque ont approuvé les statuts d’une Agence multilatérale de garantie des investissements (A.M.G.I.). Cette agence aura pour objet de garantir les risques non commerciaux, dont le risque d’expropriation pour les investissements dans les P.V.D.

Financement

Les ressources financières de la B.I.R.D. proviennent de deux sources principales: les souscriptions et les emprunts.

Au 30 juin 1986, le montant du capital versé était de 6,7 milliards de dollars avec un capital souscrit de 77,5 milliards de dollars. Comme l’encours des prêts à la même date était de 104,9 milliards de dollars, le capital social et, a fortiori, la fraction libérée servent surtout comme fonds de garantie pour les opérations d’emprunt de la B.I.R.D. La dernière augmentation générale du capital a été commencée en 1980. Compte tenu des besoins croissants de la Banque (liés aussi aux problèmes du surendettement de la plupart des bénéficiaires de ses prêts), de nouvelles augmentations du capital conditionnent à la fois les engagements de prêts qu’elle pourra prendre dans le proche avenir et sa capacité d’emprunter.

La Banque finance la plus grande partie de ses prêts avec des emprunts. En juin 1986, les emprunts à moyen et à long terme comptaient pour 65,8 milliards de dollars au passif du bilan, les emprunts à court terme pour 3,9 milliards. La Banque procède à des émissions publiques, fait des placements auprès de banques centrales ou d’États et emprunte à court terme sur le marché ou a des comptes auprès de banques centrales. La B.I.R.D. utilise beaucoup la technique de swaps afin d’abaisser au minimum le coût des ressources empruntées. Le coût moyen de l’encours s’établissait de la sorte à 8,25 p. 100 en 1986. Cela permet à la B.I.R.D. de faire payer à ses emprunteurs des taux débiteurs bien inférieurs à ceux qu’ils obtiendraient sur les marchés (s’ils parvenaient à y obtenir des prêts!...).

En général, la Banque n’intervient pas seule dans ses opérations de prêts. Ainsi, en 1986, près de la moitié des projets approuvés ont fait l’objet d’un cofinancement provenant d’autres sources. En 1985, pour 107 projets cofinancés dont le coût total est de 23,9 milliards de dollars, la contribution de la Banque s’élève à 4,8 milliards; les sources de cofinancement apportent 5 milliards, dont 2,6 pour les organismes publics, 1,3 milliard pour les organismes de crédit à l’exportation et 1 milliard pour les sources privées (banques commerciales principalement).

Les cofinancements sont faits principalement avec des organismes publics bilatéraux ou multilatéraux, des institutions de crédit à l’exportation et des banques commerciales. Ces dernières sont réticentes depuis 1982, à la suite des difficultés qu’éprouvent les pays les plus endettés à assurer le service de leurs dettes. Pourtant, depuis 1983, la Banque s’efforce d’augmenter les flux financiers des banques commerciales vers les P.V.D. en liant une partie de ces flux à ses propres prêts. Elle a aussi voulu rassurer les banques en apportant des garanties. C’est ainsi qu’elle peut accepter de prendre une participation financière directe dans les dernières échéances d’un prêt accordé par des banques commerciales, ou accorder sa garantie pour le remboursement des dernières échéances, ou encore prendre une participation conditionnelle aux dernières échéances d’un prêt de banques commerciales. Elle s’est voulue de plus en plus «partenaire pour le développement» avec des banques commerciales afin de les inciter à reprêter aux P.V.D. après 1982. Les succès restent minces. Les banques cherchent surtout à se désengager. Elles ne montent dans le train du partenariat que lorsqu’elles y sont contraintes et lorsqu’elles obtiennent des garanties de la Banque pour une fraction des prêts consentis.

Les prêts de la B.I.R.D.

À partir des années 1950, les prêts de la Banque ont été quasi entièrement réservés aux P.V.D. Cette pratique est formalisée par la méthode dite du reclassement. Elle consiste à fixer une limite de P.N.B. par habitant au-delà de laquelle un pays ne peut plus normalement demander un prêt à la Banque. En 1985, cette limite (périodiquement révisée mais souplement appliquée) était de 2 850 dollars de 1984.

Les prêts de la Banque depuis 1982 sont soumis à un taux d’intérêt variable en fonction du coût moyen pondéré des emprunts de la Banque, auquel s’ajoutent des commissions. En juillet 1986, le taux d’intérêt débiteur était de 8,23 p. 100. La durée des prêts et le différé d’amortissement sont variables. La Banque distingue trois groupes de pays. En 1985, les pays ayant un produit par tête inférieur à 791 dollars bénéficiaient des conditions les plus favorables (durée d’amortissement de vingt ans, dont cinq ans de différé). Pour les pays ayant un produit par tête compris entre 791 et 1 635 dollars, la durée était de dix-sept ans avec quatre ans de différé. Pour la troisième catégorie de pays, la durée était de quinze ans avec trois années de différé.
Types de prêts accordés par la B.I.R.D. :

– Les prêts pour un investissement précis ont pour objet de créer de nouveaux actifs productifs et des infrastructures économiques ou sociales, ou d’assurer leur fonctionnement.

– Les prêts à l’«ajustement sectoriel» ont pour but d’encourager l’adoption et l’exécution de politiques sectorielles propres à soutenir le développement. Il y a des «prêts pour l’investissement et l’entretien sectoriel», des «prêts d’intermédiation financière» destinés à fournir des fonds à des entreprises ou à des exploitations agricoles par un intermédiaire agréé dans le pays concerné, des «prêts à l’ajustement sectoriel» qui ont pour objet d’appuyer la réorientation globale de la politique générale et les réformes dans un secteur précis.

– Les prêts à l’«ajustement structurel» ont pour objectif d’appuyer des réformes visant à utiliser efficacement les ressources et à contribuer à l’équilibre de la balance des paiements tout en maintenant la croissance. De tels prêts concernent les principaux problèmes macro-économiques et multi-sectoriels.

– «Prêts d’assistance technique» pour le financement d’études et de consultations techniques.

– «Prêts de reconstruction d’urgence» en cas de catastrophes.

À l’origine et jusqu’en 1960, la B.I.R.D. concentrait ses prêts sur la mise en place des infrastructures utiles au développement. Depuis 1960, de nouvelles priorités sectorielles ou géographiques sont apparues: agriculture, services urbains, amélioration des conditions de vie des plus pauvres, éducation. L’agriculture et le développement rural reçoivent environ 25 p. 100 des prêts de la Banque et de l’A.I.D. L’Afrique subsaharienne est devenue une priorité géographique. Depuis 1985 fonctionne un fonds spécial d’aide à l’Afrique subsaharienne.
Déroulement des opérations de prêts . Chaque prêt passe généralement par six phases:

– Identification: c’est la phase du choix des projets prioritaires pour le pays concerné.

– Préparation: c’est l’emprunteur qui a la responsabilité de la préparation du projet. La Banque peut intervenir en précisant ses normes et en aidant à trouver l’assistance technique éventuellement nécessaire. Mais le projet doit rester celui du pays emprunteur et ne pas apparaître comme un projet de la Banque.

– Évaluation: elle est faite par la Banque et consiste à envoyer une équipe de spécialistes dans le pays emprunteur pour examiner le projet sous les aspects technique, institutionnel, économique et financier. C’est dans cette phase que la Banque procède à une analyse des coûts et des avantages du projet et que celui-ci est soumis aux normes économiques et financières fixées par la Banque.

– Négociation et soumission aux administrateurs: l’emprunteur et la Banque définissent leur accord de prêt et l’accord de projet si l’institution chargée de réaliser le projet n’est pas l’État emprunteur. Si l’emprunteur n’est pas un État membre, la Banque passe un accord de garantie avec l’État concerné.

– Exécution et supervision: l’exécution du projet relève de la responsabilité de l’emprunteur. La Banque procède pendant cette phase à des contrôles réguliers du projet en cours, éventuellement à l’aide d’un service chargé d’analyser sa réalisation.

– Évaluation rétrospective: tous les projets financés par la B.I.R.D. sont soumis au département de l’évaluation rétrospective qui relève des administrateurs. Cette instance examine tous les aspects du projet après réalisation: adéquation aux objectifs poursuivis, incidence économique et sociale, résultats financiers, conformité, efficacité, etc. En 1985, sur 1 014 opérations de la B.I.R.D. et de l’A.I.D. ainsi évaluées rétrospectivement, 86 p. 100 ont atteint les objectifs fixés pour le projet ou devraient raisonnablement les atteindre.

Le principal problème pour la Banque comme pour le F.M.I., depuis 1982, et surtout depuis 1985 avec les grandes opérations de renflouement du Brésil et du Mexique, est d’obtenir des banques commerciales qu’elles continuent de faire des prêts aux P.V.D. surendettés.

Les filiales de la B.I.R.D.

La Banque mondiale forme un groupe avec l’Association internationale de développement et la Société financière internationale.

L’Association internationale de développement

L’Association internationale de développement (A.I.D.; I.D.A. en anglais) a été fondée en 1960. Cette filiale de la B.I.R.D. a pour objectif de financer des projets de développement dans les P.V.D. classés les plus pauvres par la B.I.R.D. L’organisation de l’A.I.D. est la même que celle de la Banque: mêmes administrateurs, président et services. L’A.I.D. est financée principalement par des apports directs des États membres (135 en 1986): souscriptions et «reconstitutions» périodiques des ressources. Elle reçoit également des ressources financières par transferts opérés à partir des bénéfices de la B.I.R.D. En 1986, ces transferts figuraient pour 2,1 milliards de dollars au bilan de l’A.I.D., les souscriptions et ressources supplémentaires pour 36 milliards. À l’actif, le total des crédits en cours se montait à 39,6 milliards de dollars, dont 25,8 milliards décaissés au 30 juin 1986. La durée des crédits accordés par l’A.I.D. est de cinquante ans, le différé d’amortissement étant de dix ans. Le pays bénéficiaire ne paie pas d’intérêts, mais uniquement une commission de 0,75 p. 100. Le principal problème de l’A.I.D. est toujours celui de la «reconstitution» de ses ressources. Les besoins sont immenses et les États contributaires font preuve d’une certaine réticence.

La Société financière internationale

La Société financière internationale (S.F.I.), filiale de la B.I.R.D., a été fondée en 1956. Son objectif est d’aider les P.V.D. à mobiliser des capitaux intérieurs et extérieurs pour le développement d’entreprises du secteur productif privé. Les pays membres (128 en 1986, dont 107 P.V.D.) souscrivent au capital de la S.F.I. Chaque membre dispose de 250 voix et d’une voix supplémentaire par action souscrite. L’organisation de la S.F.I. est semblable à celle de la B.I.R.D., les administrateurs ne représentant évidemment au conseil de la S.F.I. que les États ayant adhéré à la Société. Le président de la B.I.R.D. est aussi président du conseil d’administration. Le capital de la S.F.I. a été porté à 1,3 milliard de dollars en 1985. Les ressources financières proviennent principalement d’emprunts auprès de la B.I.R.D., mais également d’emprunts sur les marchés financiers internationaux (après 1984). La S.F.I. intervient soit en prenant des participations au capital de sociétés, soit en accordant des prêts à des sociétés à des taux proches de ceux du marché. Une partie importante des prêts se fait en syndication avec d’autres institutions financières, banques commerciales surtout. Les prises de participation sont à durée déterminée. Leur cession à d’autres actionnaires permet d’autres prises de participation. En 1986, le portefeuille d’investissements de la S.F.I. comprenait des prises de participation et des prêts dans 378 sociétés situées dans 74 P.V.D. pour un montant de 2,4 milliards de dollars.

Fonctions d’assistance technique et d’information

La Banque mondiale fournit une assistance technique associée à ses opérations de financement, notamment au stade de l’évaluation des projets. Dans les années 1980, le rôle de l’assistance technique a été étendu par l’attention croissante portée par la Banque à l’amélioration du cadre institutionnel et à la formation dans les projets de développement. La Banque contribue aussi à la formation des responsables nationaux des projets de développement par l’intermédiaire de son Institut de développement économique.

La Banque est enfin un centre mondial de recherche et d’information en matière financière et en économie du développement. Parmi ses nombreuses publications, on peut citer les Rapports annuels de la Banque mondiale, Rapports (annuels) sur le développement dans le monde, World Debt Tables et les études sur les pays membres.

3. La Banque des règlements internationaux

Historique et objectifs

La Banque des règlements internationaux (B.R.I.) est la plus ancienne institution monétaire et financière internationale – l’acte constitutif a été signé le 27 février 1930. Elle a commencé ses opérations le 17 mai 1930 à Bâle, ville de son siège.

À l’origine, la B.R.I. avait été créée d’abord pour faciliter l’exécution des réparations allemandes dues au titre de la Première Guerre mondiale. Le plan Young, adopté à la conférence de La Haye le 20 janvier 1930, où avait été également signé l’accord international créant la B.R.I., avait pour objet d’organiser la commercialisation des annuités payées par l’Allemagne. La B.R.I. était chargée d’appliquer le plan Young, de faire fonction de mandataire pour la réception des annuités et leur répartition entre pays créanciers et d’agir sur la capacité de paiement de l’Allemagne. Mais, dès le moratoire Hoover et la conférence de Londres en 1931, le plan Young fut interrompu et la B.R.I. perdit ses principales fonctions à ce titre.

Pendant les années 1932-1945, la B.R.I. continua d’exercer au ralenti certaines fonctions de coopération entre banques centrales membres. Il fut question de la liquider lors de la conférence de Bretton Woods en 1944. Mais il ne fut pas donné suite à cette proposition.

La collaboration entre banques centrales membres de la B.R.I. n’avait pas été interrompue et elle a repris très activement dès 1946. De nouvelles tâches allaient apparaître, conformes aux statuts de la B.R.I. Ceux-ci précisent que «la Banque a pour objet: de favoriser la coopération des banques centrales et de fournir des facilités additionnelles pour les opérations financières internationales; et d’agir comme mandataire ou comme agent en ce qui concerne les règlements financiers internationaux qui lui sont confiés»... Après les profondes désintégrations monétaires et commerciales des années 1930 et de la Seconde Guerre mondiale, il y avait, en effet, beaucoup à reconstruire. À côté du F.M.I. et de la Banque mondiale nouvellement créés, la B.R.I. n’était pas de trop. Elle est à la fois une banque spécialisée et une institution pour la coopération entre banques centrales membres et une banque pour les banques centrales.

Organisation

La B.R.I. est constituée sous la forme d’une société par actions souscrites par les banques centrales participantes pour environ 85 p. 100 et, pour le reste, par des actionnaires privés. Seules les banques centrales participent à l’assemblée générale et ont droit de vote. Mais la Banque est aussi une institution internationale issue de l’accord de La Haye de 1930; à ce titre, elle relève du droit international.

En 1986, vingt-neuf banques centrales sont représentées à l’assemblée générale de la B.R.I. Vingt-quatre sont des banques centrales européennes, dont six de pays socialistes (Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Tchécoslovaquie et Yougoslavie). Cinq sont des établissements extra-européens: Afrique du Sud, Australie, Canada, États-Unis, Japon.

Les organes de la B.R.I. sont l’assemblée générale, le conseil d’administration et la direction. Le conseil d’administration est composé des gouverneurs en exercice des banques centrales de R.F.A., de Belgique, de France, d’Italie et du Royaume-Uni, membres d’office. Ils nomment chacun un autre administrateur de leur nationalité au conseil. Les États-Unis n’occupent pas les deux sièges auxquels ils ont droit au conseil, mais sont régulièrement représentés dans les autres instances de la B.R.I. Ce noyau de douze administrateurs choisit des administrateurs cooptés parmi les gouverneurs de banques centrales non représentées de droit (actuellement: Pays-Bas, Suède, Suisse). Le conseil d’administration nomme en son sein le président de la B.R.I. et nomme le directeur général et les autres membres de la direction. La B.R.I., bien que très largement «internationale», est donc dirigée par des autorités de banques centrales de l’Europe occidentale.

Son bilan s’élevait au 31 mars 1986 à 26,558 milliards de «francs or», soit environ 51,6 milliards de dollars. Le taux de conversion d’un franc or, unité d’expression du bilan, est, par convention, de 1,941 49 dollar. Le capital autorisé est de 1,5 milliard de francs or.

Fonctions de la B.R.I.

On peut distinguer actuellement six fonctions principales de la Banque des règlements internationaux.

En premier lieu, au titre de la coopération monétaire et financière des banques centrales dont elle est l’intermédiaire, la B.R.I. assure la gestion d’une partie des réserves de nombreuses banques centrales. Plus de quatre-vingt banques centrales du monde entier ont des dépôts à la B.R.I. Environ 10 p. 100 des réserves mondiales en devises sont de la sorte gérées par la B.R.I. Mais elle a également conservé un rôle pour la gestion de réserves d’or et pour le clearing de l’or qui figure pour 9,33 milliards de dollars, sous forme de dépôts de banques centrales, à son passif.

Une partie des ressources de la B.R.I. est placée sur le marché par l’intermédiaire de banques commerciales de premier ordre. La B.R.I. ne peut faire d’avances aux gouvernements, ni leur ouvrir de comptes courants.

Une partie importante mais variable des dépôts de la B.R.I. est affectée à l’octroi de concours divers à des banques centrales: crédits garantis par un nantissement d’or ou de titres à court terme négociables, crédits accordés contre des dépôts en or ou en devises, crédits sous forme d’avances ou de constitution de dépôts, crédits stand-by, opérations de swap contre or.

On touche ici à la deuxième fonction de la B.R.I., celle de régulation du système monétaire international et de participation à certaines opérations de sauvetage de pays au bord de la cessation de paiements. En effet, lors de l’aggravation des problèmes d’endettement de certains pays à partir de 1982, en tant que pourvoyeur de crédits aux banques centrales, la B.R.I. a accordé des crédits relais à des banques centrales d’Amérique latine. En 1984, la B.R.I. a conclu avec le F.M.I. un accord de crédit de 2,5 milliards de D.T.S. afin de renforcer les moyens de ce dernier.

Mais, avant 1982, la B.R.I. était déjà intervenue aux côtés d’autres banques centrales pour fournir des ressources importantes, par exemple à la Banque d’Angleterre en 1966, 1968 et 1977, et à la Banque de France en 1968, lorsque ces pays ont eu des difficultés de paiement particulièrement graves. Dans le même domaine d’opérations, la B.R.I. participe depuis 1962 aux arrangements de swaps conclus par les autorités monétaires américaines avec certaines autres banques centrales. En ce sens, la B.R.I. est l’un des grands opérateurs particulièrement importants pour la régulation des relations monétaires internationales.

En troisième lieu, la B.R.I. est un centre d’études et d’information au service des banques centrales. La B.R.I. réalise pour elles des études et des statistiques dans le domaine des politiques monétaires internes et externes, de l’analyse des marchés internationaux bancaires et financiers et de l’endettement international. À ces divers titres, elle assure le secrétariat du groupe des experts informaticiens des banques centrales du groupe des Dix et du groupe d’experts sur les systèmes de paiements des banques centrales du groupe des Dix, du groupe d’experts des banques centrales sur les questions relatives à la banque de données monétaires et économiques. Elle réalise également la collecte de données statistiques sur le financement des excédents et des déficits extérieurs des pays du groupe des Dix. Elle publie un rapport annuel qui a la réputation méritée de rechercher le maximum possible de lucidité et d’indépendance idéologique dans l’analyse des relations économiques et financières internationales. Enfin et surtout, la B.R.I. constitue un lieu de rencontre et d’échange d’informations pour de très nombreux dirigeants et experts en matière de politique monétaire intérieure et extérieure. La B.R.I. agit, certes, directement de multiples façons, mais elle agit surtout par l’intermédiaire de ces très nombreux échanges d’informations qui aboutissent souvent à la définition de règles de conduite plus ou moins explicites pour les autorités monétaires.

Quatrièmement, la B.R.I. organise la coopération internationale entre autorités de surveillance des banques commerciales. Depuis 1971, il existe à la B.R.I. un comité permanent des euromonnaies qui fournit aux banques centrales du groupe des Dix des renseignements sur les euromarchés. Pour coordonner la surveillance bancaire au niveau international, les banques centrales du groupe des Dix ont également créé en 1974 un comité des règles et pratiques de contrôle des opérations bancaires, dont la B.R.I. assure le secrétariat. Son rôle est de déterminer des règles de contrôle bancaire de façon à assurer de meilleures solvabilité et liquidité des banques, ainsi que le contrôle de leurs positions de change. Il a proposé des principes pour la répartition des contrôles entre autorités des pays d’origine et d’accueil des banques mères, de leurs succursales, filiales et sociétés en participation (consortiums). Ce sont ces préoccupations qui ont abouti au concordat de Bâle de 1974 et au concordat révisé de 1983, où sont notamment déterminées les responsabilités du «prêteur en dernier ressort» et le principe du «contrôle consolidé». Selon ce dernier, les banques mères et les autorités de contrôle du pays d’origine surveillent l’engagement risque des banques ou groupes bancaires dont elles sont responsables, ainsi que le niveau de leur capital, sur la base de leur activité globale où qu’elle soit effectuée.

En cinquième lieu, la B.R.I. a de nombreuses fonctions en qualité d’agent au service des Communautés européennes. Elle a été, tout d’abord, l’intermédiaire financier (tiers convenu) entre la Communauté européenne du charbon et de l’acier (C.E.C.A.), les créanciers bailleurs de fonds prêtés à la C.E.C.A. et les entreprises bénéficiaires des prêts C.E.C.A. En second lieu, la B.R.I. a pris en charge, depuis 1964, le secrétariat du comité des gouverneurs des banques centrales des États membres de la Communauté économique européenne (C.E.E.) et, depuis 1973, du conseil d’administration du Fonds européen de coopération monétaire (Fecom). Ces fonctions ont pour objet de contribuer au développement de la collaboration des banques centrales de la C.E.E. En troisième lieu, la B.R.I. est l’agent du Fecom: elle tient à ce titre ses comptes de dettes et de créances, opère ses règlements de dettes et créances, tient les comptes d’opérations réalisées dans le cadre du soutien monétaire à court terme des pays membres, les comptes d’opérations de swap portant sur la création d’E.C.U., et les comptes d’intérêts versés aux banques ou payés par les banques centrales au titre des avoirs ou dettes en E.C.U. De plus, la B.R.I. assure la gestion des opérations liées aux emprunts et aux prêts de la C.E.E.

Avec l’extension de l’usage privé de l’E.C.U., la B.R.I. assure depuis la fin de 1986 la compensation des positions en E.C.U. des principales banques commerciales actives dans ce compartiment.

Sixième fonction de la B.R.I.: depuis 1976, les gouverneurs des banques centrales représentés à son conseil d’administration et les membres de sa direction rencontrent deux fois par an les gouverneurs des banques centrales des pays d’Europe de l’Est. Ces réunions sont consacrées à l’échange d’informations sur les problèmes d’intérêt mutuel.

En conclusion, la B.R.I. assure des services demandés par les banques, et utiles pour de nombreuses banques centrales dans le monde, et tout particulièrement pour les banques centrales européennes et du groupe des Dix. Ses méthodes de travail ont pu paraître discrètes. On peut penser que c’est une condition de son efficacité, particulièrement appréciée par ses déposants, les bénéficiaires de ses interventions et ses mandants.

Comme la B.R.I. agit pour et avec des banques centrales sur le système monétaire et financier international, son action de régulation est la plupart du temps indirecte. En effet – car les banques centrales sont dans l’ensemble plutôt régulatrices –, les «dérégulateurs» (gouvernements, banques et autres institutions financières commerciales, agents non financiers) ne peuvent être le plus souvent atteints par la B.R.I. qu’indirectement et, en général, a posteriori, après qu’ils ont déclenché les mouvements déséquilibrants dans le système. Bien que la B.R.I. fournisse des normes et des règles de conduite pour les politiques monétaires et financières (afin d’assurer le maximum possible de libéralisation des paiements internationaux et de promouvoir la stabilité monétaire intérieure et extérieure), les limites de son action se trouvent dans ce caractère indirect de ses interventions. Cela provient principalement du fait qu’elle n’a pas été créée pour être une institution du refinancement ultime, ni une banque d’émission internationale. Elle est une banque pour les banques centrales et un lieu où sont définies pour elles des actions de collaboration et de coopération.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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